Interview

Entretien avec Nicolas Ziesel de KOZ Architectes

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Entretien avec Nicolas Ziesel de KOZ Architectes

"Le bois, toujours dans nos cœurs et, si possible, dans nos projets !

Nicolas Ziesel est un architecte animé par une ambition : construire en bois. De ses débuts dans les années 1990 à la gestion de son agence d'une trentaine de collaborateurs, nous nous sommes entretenus avec lui, de ses premiers souvenirs d'architecture à sa vision de l'avenir.

Bonjour Nicolas ! Es-tu prêt à nous dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité ?
‍"
Bonjour, eh bien oui je promets d'essayer !

Revenons à vos premiers pas dans l'architecture...
‍Avec
mon associé, nous nous sommes rencontrés lors de nos études à l'école d'architecture de Paris Belleville dans les années 1990. Très tôt, nous avons commencé à travailler ensemble. Plus de vingt ans plus tard, il faut avouer quelque chose : nous n’avons jamais été aussi riche que lorsque nous étions étudiants ! (Rires) Personne ne nous avait expliqué qu’il fallait reverser la TVA.
A cette époque, certaines agences nous sous-traitaient une partie des concours et nous étions payé en liquide. C’était merveilleux.

KOZ, votre agence, est née à cette époque ? L'envie de se regrouper en agence, oui, mais elle n'a été formellement créée qu'en 1998. Les choses se sont faites tout naturellement, passant d'un atelier d'étudiants à une agence.

KOZ ... Pourquoi ce nom ?
A l'origine, nous étions trois associés, et cela correspondait à nos initiales.

Vous étiez donc le Z ...
Absolument, et le partenaire K est parti.

Et vous ne vouliez pas rebaptiser l'agence OZ !
A l'origine, comme c'est souvent le cas, nous n'avions pas beaucoup de moyens. Fiers d'avoir trouvé le nom de l'agence, nous avons fait faire des plaquettes de présentation pour démarcher de nouveaux projets. Au moment où nous avons reçu les 500 brochures imprimées, le troisième partenaire a annoncé qu'il voulait retourner dans sa région d'origine. Le dilemme était complet : les utiliser malgré le nom KOZ à chaque page ou les jeter.

L'acte fondateur de l'agence était donc anti-gaspillage...
Un peu oui ! 

Parlez-nous du travail de l'agence.
Nous avons débuté sur des concours publics, plutôt en régions. Rapidement, après la livraison de notre premier bâtiment, l’agence s’est tournée vers la construction bois. Il faut se le dire : le marché n’était pas mature à l’époque. Les villes et les maîtres d’ouvrage étaient frileux, et lorsque nous parvenions à décrocher un concours, il y avait toujours une bonne raison de ne pas le faire en bois. Nous avons perdu 30 concours d’affilée comme ça.

Vous avez été un pionnier avec ce matériau... 20 ans plus tard, il est sous les projecteurs !
Effectivement ! Et il y a encore beaucoup de recherche à faire sur le matériau et sur l’écologie des forêts, c’est passionnant.

Comment se passe la rentrée dans le contexte actuel ?
C'est très, très... speed ! Nous n'avons pas connu d'arrêt, et le confinement a été rempli par plusieurs projets en étude. Nous sommes dans une situation un peu étrange, avec l’impression que tout va très vite, tout en faisant face à un cruel manque de visibilité sur les prochains mois.

Quel est le verdict sur le télétravail dans l'agence ?
Le hasard du calendrier nous a aidés. Au moment où le confinement est annoncé, une partie de l’agence faisait ses cartons pour s’installer au cœur d’un de nos gros projets du moment, afin d’en faciliter la gestion : le village des athlètes pour les Jeux Olympiques de Paris 2024. En ce sens, nous avions déployé tous les outils nécessaires à un travail en distanciel, avec des équipes dispatchées. Cela nous a indéniablement aidé à franchir l’obstacle.Il n’en demeure pas moins vrai qu’à distance, on perd la fluidifié des échanges spontanés qui font qu’un projet avance. Le télétravail a clairement ses limites.

Cette période a-t-elle changé quelque chose dans votre organisation ?
Les changements les plus significatifs sont liés aux réunions. Une chose semble relativement certaine : nous ne reviendrons pas à des réunions de 2 heures en personne, à l'autre bout de la France, qui prennent toute une journée de travail aux employés qui doivent s'y rendre.
Actuellement, à l'agence, nous avons au moins 2 vidéoconférences par jour.

Peut-être est-ce là l'origine du sentiment d'accélération que vous avez mentionné au début de l'entretien ?
Sans aucun doute. Les réunions arrivent plus vite, les demandes des clients aussi... Comme toute nouveauté, elle a besoin de se stabiliser. Mais les bénéfices sont déjà visibles. Maintenant, justifier la présence de dix personnes dans une pièce pendant une heure pour travailler sur un projet est devenu un défi.

A distance, les outils de gestion facilitent-ils le processus ?
Elles se sont même révélées indispensables. Avec OOTI, nous avons à disposition un support collaboratif très intéressant, permettant de mettre à jour l’état d’avancement des projets tout en offrant une vision d’ensemble à tous les collaborateurs de l’agence.Cela associé à une solution d’échange en direct comme Basecamp, offre une belle alternative de gestion dans une configuration à distance.

Comment voyez-vous l'avenir de l'architecture dans la période post-pandémique ?
Sacrée question ! Forcément les choses sont appelées à évoluer mais il me semble prématuré de savoir comment elles le feront. Nous sommes encore au cœur de cette période d’incertitude. La priorité des agences est de dire : "Il faut tenir bon". Quand nous aurons passé cette phase, nous pourrons en reparler.

Sans transition, si vous n'étiez pas devenu architecte, que pensez-vous que vous auriez pu devenir ?
Avant de devenir architecte, je souhaitais être archéologue. La question de la vie des gens m’interroge. Ces deux métiers vont dans un sens opposé, mais s’intéresse à la même chose : l’archéologue s’intéresse à la façon dont les gens vivaient avant, l’architecte quant à lui se questionne sur la manière dont les gens vivront demain.

Quel est votre premier souvenir d'architecture ?
J’ai eu la chance de passer un an aux États-Unis lorsque j’étais plus jeune. Parmi les souvenirs que je garde de cet épisode de ma vie, la visite de l’Université de Yale à New Haven, et en particulier du bâtiment abritant la bible de Gutenberg reste un moment très fort. En découvrant cet édifice, ce fut la première fois que j’étais impressionné par une réalisation architecturale. En albâtre blanc, massive, la réalisation impose son poids sous lequel il faut passer pour découvrir un intérieur grandiose, fait de volumes baignés d’une lumière ambrée, avec une mise en scène présentant la Bible de Gutenberg.

Beinecke Rare Book and Manuscript Library, Yale University, New Haven

Ensuite, vous vous êtes dit : "Je veux devenir architecte."
Absolument pas ! Ça m’est venu plus tard, l’année du baccalauréat. Par hasard, j’ai assisté à une charrette. J’ai adoré la façon dont ils travaillaient, les échanges, la liberté créative, la spéculation sur le projet … J’ai aimé cette réflexion intellectuelle, qui se portait sur un objet concret, utile.

Selon vous, qu'est-ce qui fait un bon architecte ?
La curiosité, le fait de s’intéresser à tout, être sans arrêt à l’affût, être obstiné tout en étant ouvert, opportuniste pour saisir les bonnes occasions…A cela, il faut ajouter une bonne dose d'optimisme !


Quelle est la plus belle réalisation architecturale, selon vous ?
Ce n'est pas non plus une question facile ! Je ne sais pas si c’est la plus belle, mais la réalisation architecturale qui m’a fait l’effet le plus fort, qui m’a permis de vivre l’intensité d’une expérience mystique sans spiritualité, c’est le musée d’art de Teshima de l’architecte Ryue Nishizawa, au Japon. C'est une réalisation qui abrite une œuvre d'art tout en étant indissociable d'elle, avec une inscription dans le site, une émotion... Rien que d'en parler, j'en ai des frissons !

Musée d'art de Teshima au Japon. Ryue Nishizawa Architecte

Quelle est votre plus grande fierté dans votre métier ?
‍En tant qu'
architecte, on a toujours tendance à se demander comment faire mieux, différemment. Ainsi, ma plus grande fierté dans ma profession ne se trouve pas dans une réalisation particulière mais plutôt dans l'engagement pour la construction en bois et ce que nous visons à développer autour d'elle.
Je pense notamment à ce que nous essayons de mettre en place avec les pays tropicaux, pour répondre à de vraies problématiques d'habitat et de société. Nous travaillons à développer des projets basés sur la structuration d'une filière bois locale. L'objectif est de répondre au besoin de dynamisme économique, tout en résolvant le problème de l'habitat précaire par l'actualisation de l'architecture vernaculaire. Nous avons commencé au Gabon, nous sommes maintenant aussi au Cameroun et en Martinique. A chaque fois, le chemin pour mener à bien ce type de projet est long, sinueux et incroyablement riche en ressources humaines...

Quel est votre prochain projet ?
Un complexe sportif, en bois, forcément, qui sera livré à Joinville-en-Champagne (52). Le bois, toujours dans nos cœurs, et si possible, dans nos projets !

Pour en savoir plus sur les projets de KOZ, consultez leur site web : https://koz.fr

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